[Terminé] Where there are sheeps, wolves will always thrive - Erik

Where there are sheeps, wolves will always thrive

Voilà quelques jours que Charlie avait enfin retrouvé l'enceinte protectrice du château, qu'elle était de nouveau en sécurité. Dès le lendemain de leur arrivée, elle s'était empressée de trouver Adam avant qu'il ne parte rendre des comptes à Alderic. Elle n'avait eu qu'une idée en tête : donner des explications à Adam et en finir avec tout ça, ces remords qu'elle avait, cette tension qu'elle sentait entre eux et ces non dits qu'elle détestait. Retrouver la proximité, la confiance qu'elle avait avec lui était devenu essentiel à la jeune femme. A l'avenir, elle le savait, elle devrait essuyer bon nombre de nuits torturées, alors autant passer des jours agréables. Et elle ne s'était pas trompée.

Portant la ceinture et le couteau d'Adam, Charlie, qui avait terminé son travail aux champs, se rendit au puit pour se rafraichir. Rien de très fatiguant, comme promit à son ami d'enfance. Il s'agissait de préparer des semis, planter des graines dans des plaques compartimentées en terre cuite, voilà tout. L'après-midi était déjà bien entamée et elle se dirigeait vers la zone d'entraînement, peut-être pour y trouver Adam ou bien regarder les autres guerriers s'entraîner comme elle le faisait souvent ces derniers temps.

Mais avant qu'elle n'y parvienne, une silhouette qui lui paru familières attira son attention. Elle s'arrêta dans la cour, regardant cette dernière s'engouffrer dans le château et oubliant tous ses projets. Hésitante, elle se décida finalement sur un coup de tête. Espérant ne pas la perdre de vue, elle se mit à courir aussi vite que lui permettait sa hanche tout en maintenant son chapeau de paille sur sa tête pour ne pas qu'il tombe. A peine eut elle passé la porte et senti l'atmosphère fraiche des lieux se poser sur sa peau qu'elle s'écria : "Erik?!" Elle n'était sûre ni de la présence d'une âme dans l'entrée, ni de son identité. Ses yeux ne s'étaient pas habitués à la différence de luminosité et avant ça, elle n'était pas convaincue de l'avoir réellement aperçu. Alors elle resta plantée là, espérant une réponse positive. C'était bien la première fois qu'elle allait vers lui depuis qu'elle avait fait sa connaissance.

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Where there are sheeps, wolves will always thrive

La journée est assez chaude et il n’y a pas grand-chose à faire dans ce château à part s’entrainer et c’est ce qui occupe la plus grande partie de mes journées depuis que je suis devenu un guerrier. Ce n’est pas une sinécure comme vie. Ce n’est que douleur et sang pour forger des âmes guerrières efficaces au combat et qui ne sauraient craindre une rencontre avec des carnivores.

Ce qui est le plus étrange, c’est que cette vie semble de plus en plus étancher ma soif de sang et calme mes lubies de tueries gratuites, pourtant souvent orientées à l’encontre de la gent féminine. Pourtant, je crois bien avoir franchis une sorte de cap et la mise à mort des dinosaures de l’île suffit à me combler de joie. Sans aucun doute parce que je sais bien qu’ils sont pensant et que je peux lire la détresse dans leur regard au moment de les abattre.
Quelque part, je crois que plus je passe du temps au milieu des Outsiders, plus je m’humanise à nouveau tout en pouvant vivre pleinement mon penchant sanguinaire. J’ai commencé à éprouver une forme sommaire d’amitié sincère envers certains membres de la communauté, à commencer par Adam bien entendu, mais surtout Morrigan avec qui j’ai bien l’impression de partager des points communs.
Certaines choses n’ont pas encore changé et je ne fais pas grand cas du sort de bons nombres de gens qui vivent au château ou à proximité dans les quelques corps de ferme qui alimente notre communauté. Mais c’est mieux que rien, c’est peut-être le début d’un changement profond en moi qui me faisait peur au début et qui me paraît de moins en moins effrayant à mesure qu’il se passe.

C’est à un moment perdu dans mes pensées que je reviens à ce que je fais au final, rabroué par un jeune qui me demande de me dépêcher de lui montrer comment se battre à moins que je n’aie finalement peur de lui. Il me toise avec un large sourire de vainqueur avant de foncer sur moi. Je m’abaisse à ce moment-là voutant mon dos tout en allongeant ma jambe pour faucher les siennes et ainsi réceptionner son torse contre mon dos avant de me redresser pour finir de le faire voler par-dessus moi et ainsi le projeter au sol. Le mouvement est fluide et rapide. Je tombe enfin sur lui, genou sur son plexus et dague sur sa gorge avant de terminer l’humiliation d’une pichenette sur le nez, achevant les spectateurs avec une crise de rires gras et moqueurs.

J’en ai plus qu’assez et je me décide de quitter le terrain d’entraînement pour gagner le château. J'ai laissé quelques-uns de mes effets dans l’entrée, à commencer par ma besace où se trouve toujours le précieux pistolets et les quelques balles récupérées dans l’épave découverte avec Morrigan. J’entends alors mon nom être crié et je me retourne tout en faisant attention à ce qu’on ne puisse voir l’intérieur de mon sac. C’est la petite Charlotte, la bien-aimée d’Adam. C’est étonnant. Bien des mois après notre excursion pour aller la retrouver, la voilà qui se décide à me parler, elle qui n’avait pas caché son inimitié envers moi à l’époque.

Erik ▬ Charlotte ? Que me vaut le plaisir ?

”Plaisir”, il faut le dire vite pour le moment. Je ne sais pas à quelle sauce je vais être dévorer, mais cette petite est une lionne qui ne mache pas ses mots et sachant qu’elle ne m’apprécie pas beaucoup, je me demande ce qu’elle me veut.

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Quelques secondes suffirent à ce que les pupilles de la brune s'adaptent assez à l'obscurité du château pour lui permettre de distinguer le visage d'Erik. Elle arborait un sourire courtois, du même registre dont ses paroles semblaient imprégnées. A chaque fois, c'était pareil. Sans qu'il y ai d'explication ou de raison réelle à cela, Charlie avait du mal avec cet homme. Quelque chose d'indescriptible lui avait sauté au visage ce fameux jour où elle avait fait sa connaissance, alors qu'il était grimé en parfait citoyen dinotopien, à Waterfall city. Il avait été porteur de bonne nouvelle pourtant. Elle n'oubliait pas sa joie lorsqu'il avait été question d'Adam. Mais dès lors, une petite voix intérieur lui avait crié de s'en méfier. Peut-être était ce le contexte qui l'avait fait naître, mais cette petite voix était toujours là, même aujourd'hui, malgré ses efforts pour la faire taire.

Elle lui sourit. "Salut!" fit-elle en reprenant son souffle, "J'étais pas sûre que... enfin bref. Je voulais..." Un peu gênée de ce qu'elle s'apprêtait à dire, Charlie replaça correctement son chapeau puis sa ceinture, espérant que ce simple geste lui donne un peu plus d'assurance. En temps normal, l'australienne n'avait aucune difficulté pour faire ce genre de chose, mais en plus d'avoir un peu tardé, il lui semblait qu'Erik avait senti son aversion à son encontre. Avec la fatigue et les émotions, Charlie avait eu de la peine à s'en cacher et elle s'en voulait. "Je voulais te remercier." dit-elle finalement. "Pour avoir accompagné Adam jusqu'à Waterfall city... et pour être venu me chercher en ville, tout ça. Je te l'avais jamais dit, mais merci, vraiment." Evidemment, la brune était sincère. Elle l'était toujours. Si l'on prenait les faits, Charlie n'avait jamais rien demandé à Erik à proprement parlé. Mais par ses actions, sa présence avait été requise et en cela, elle était plus que concernée et se sentait redevable. "Et puis, j'ai pas été très sympa non plus, alors excuse moi." ajouta Charlie en se forçant à soutenir son regard.

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J’appréhende un peu cette conversation avec la jeune fille ce qui est assez inhabituel pour moi qui suis très à l’aise avec les gens. Je ne les aime pas, mais je n’en suis pas moins capable de faire preuve de beaucoup de sociabilité, ne serait-ce que de circonstance et d’apparence. Toutefois, avec Charlotte, c’est une autre histoire. Elle, elle a perçu ma nature au moins un instant. Comme une proie bien avisée de la présence d’un prédateur. C’est ce que son attitude à mon encontre lors de notre rencontre m’a laissé entendre. Ce n’était pas la première fois que cela m’arrivait, bien au contraire. Certaines personnes sont étrangement réceptives à ça, comme s’il était possible pour ces dernières de percevoir que tout n’est qu’un masque ou que quelque chose cloche et sonne faux. Est-ce qu’elle a deviné que je suis un monstre à l’intérieur qui se pare du visage d’un saint ? Peut-être pas, mais elle a eu un recule et dispose toujours sans doute d’une forme de méfiance à mon encontre.

L’occasion est peut-être idéale pour calmer ses doutes et devenir quelqu’un de fiable de son point de vue. Ça ne me coûte rien si ce n’est un peu de temps et j’en ai plus qu’il n’en faut depuis mon arrivée sur l’île.

La jeune femme se montre assez hésitante lorsqu’elle prend la parole, comme si je l’intimide ou qu’elle cherche ses mots à cause du malaise que je provoque chez elle. J’habille mon visage d’un grand sourire, évidemment faux, par politesse et je décide ensuite de le faire disparaître bien vite. Peut-être qu’avec elle, cela passera mieux si j’adopte plutôt une approche plus froide et austère, plus proche de ma nature calculatrice.
Elle m’annonce finalement vouloir me remercier pour avoir accompagné Adam jusqu’à Waterfall City et surtout avoir été la trouver en ville. Je décide de sourire avant de laisser échapper un petit rire.

Erik ▬ Tu l’imagines vraiment en ville entouré de saurien un peu partout à ta recherche ? Ah ah, il valait mieux pour tout le monde que je l’accompagne si tu veux mon avis ah ah ah !

Je ris de bon cœur pour une fois car j’imagine la scène où Adam déambule au milieu des rues et avenues qui lui sont étrangères avec le dégout inscrit sur son visage à chaque dinosaure qui lui apparaît.

Erik ▬ Pour le coup c’est plus pour tes excuses, que je te remercie, ça me touche. Vraiment. Je ne pensais pas vraiment mériter ton irritabilité du moment, mais bon, vu ta blessure, j’ai surtout mis ça sur le compte de la douleur et de mon arrivée comme un cheveu sur la soupe.

Je préfère jouer la carte d’une presque vérité pour l’amadouer tout en laissant entendre que je suis compréhensif et que je ne lui en veux pas. Dans les faits, c’est vrai, je n’ai pas fait grand cas de sa réaction après tout.

Je vois qu’elle porte un couteau que j’ai déjà vu, porté par Adam. C’est peut-être l’occasion de faire une accroche pour nouer un semblant de lien avec la demoiselle et effacer le passé.

Erik ▬ Je vois que tu es plus armée que la dernière fois où je t’ai vu. Dis-je en faisant un signe de tête vers son couteau.

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Charlie, premièrement encouragée par le sourire d'Erik, se décide enfin à dire ce qui lui restait sur le coeur à propos de ce voyage. La liste n'est pas longue, mais elle ne veut rien oublier. Puis soudain, ce sourire s'évanouit et Charlie ne sait plus. Etait ce une bonne idée, vraiment? L'aurait elle vexé, blessé plus que de raison, ou bien c'était son approche qui n'allait pas? Quoi qu'il en soit, maintenant qu'elle était lancée, elle irait jusqu'au bout. elle soutint son regard, tâchant d'y trouver un peu de douceur, de la bienveillance même, mais son jugement n'était pas objectif et elle abandonna bien vite l'idée. Elle se contenterait de ce qu'il lui donnerait, si toutefois il voulait bien lui céder quelque chose. Et ce quelque chose en l'occurrence, ce fut un rire franc.

Le regard de la brune s'agrandit, son menton se releva légèrement et elle si jusque là elle était resté très sérieuse... "Non, pas vraiment." ...eh bien là, elle se mit à pouffer, partageant son rire avec lui. La pression venait de redescendre d'un coup et elle reprenait des couleurs. En effet, la scène qu'elle s'imaginait à son tour était particulièrement amusante lorsqu'on connaissait ne serait-ce qu'un minimum Adam mais plus important que cette plaisanterie, elle se sentait de nouveau redevable pour cette bouffée d'air frais qu'il lui avait permis de prendre. Charlie avait beaucoup appréhendé cette conversation car s'il y avait bien une chose qu'elle détestait, c'était faire du mal aux gens, d'autant plus quand ils ne le méritaient pas.

Surprise, elle retrouva son calme. "C'est vrai que j'en ai plutôt bavé... enfin bon, c'est pas une excuse pour se conduire comme une idiote. Toi, t'avais bien des jours de voyage dans les jambes et ça t'as pas empêché d'être gentil." Evidemment, elle avait des circonstances atténuantes, mais Erik n'en avait pas connaissance et ça ne risquait pas d'arriver de si tôt, du moins pas par son biais, alors ça ne comptait pas. Et puis elle pensait ce qu'elle venait de dire. Elle n'était certainement pas la seule à subir cette île de manière générale, alors elle n'avait pas plus le droit que les autres de se conduire mal. Ce qu'elle avait ressenti à son propos relevait de l'abstrait, il n'avait rien fait pour le mériter, point à la ligne.

Instinctivement, Charlotte baissa les yeux sur sa ceinture, souriant de toutes ses dents. Elle avait retrouvé un peu de sa gaieté naturelle puisqu'Erik ne semblait pas lui en vouloir et avait accepté ses remerciements et ses excuses. Son coeur semblait plus léger et l'ambiance aussi. "Oui, c'est vrai! C'est un cadeau d'Adam! Je suis pas sûre de lui faire honneur, mais c'est très utile." dit-elle en abordant l'aspect pratique de la chose. Bon, Adam lui avait bien montré deux ou trois choses, mais la brune n'osait pas vraiment se servir du couteau pour autre chose que couper de la ficelle ou son bout de pain du déjeuner qu'elle prenait parfois au milieu des champs.

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Les interactions avec les autres, c’est une vraie difficulté quand vous n’avez pas vraiment d’empathie, comme c’est le cas pour moi. J’arrive à percevoir les émotions, mais je ne les comprends pas toujours ou en tout cas, je n’arrive que rarement à les faire correspondre à ma personne. Cependant, on apprend vite et la plupart des personnes pensent de la même façon et on élabore des automatismes qui en l’occurrence ne fonctionnent pas avec tout le monde. Charlie a perçu lors de notre rencontre ma noirceur intérieure, c’est certain, aussi ai-je décidé de lui montrer une facette plus brute afin que mes sourires fassent moins factices, car plus rare. Parfois, une personne trop avenante paraît bien plus étrange que quelqu’un de froid qui se laisse aller ici et là. Comme elle est très proche d’Adam, c’est sans doute une forme de personnalité qui est plus en adéquation avec Charlie. On ne peut pas dire que le meilleur guerrier du clan soit un modèle de démonstration d’émotion et c’est sans doute pour ça qu’il me sera plus facile de nouer le contact avec elle en arborant une façon d’être plus bourrue.

Cela porte ses fruits, car quand je me laisse aller à rire réellement en imaginant Adam évoluer en plein cœur d’une ville dinotopienne, cela semble abaisser les défenses de la demoiselle et l’encourager à être plus détendue, elle qui était sur la réserve. La jeune femme commence même en s’excusant et en rebondissant sur ma réponse.

Erik ▬ Ne t’en fait pas trop. Si j’avais pris à cœur ce que tu m’as dit ce jour-là, tu l’aurais su. On a tous nos petites façons de réagir après tout.

Je sais que dans ces cas-là, il faut dédramatiser la situation afin que la personne se sente mieux. Toutefois, je suis aussi de nature curieuse et j’aime en savoir un maximum sur les gens. D’ordinaire c’est surtout pour avoir des moyens de pressions par la suite, mais je ne sais pas vraiment de quoi il s’agit ici alors que je lui réponds une nouvelle fois.

Erik ▬ C’est vrai que t’as l’air d’avoir encore des séquelles. Il s’est passé quoi pour que tu sois dans cet état ?

Je me doute qu’elle a sans doute été attaqué par des carnivores ou a fait une très mauvaise chute lors de son voyage, mais une petite politesse en demandant est toujours la bienvenue. Ça a au moins le mérite de lui montrer que je m’intéresse un peu à elle.

L’ambiance se détend très vite et je peux voir un très joli sourire de la part de la jolie brune. À voir ce qu’il se passe devant mes yeux, le regard de la jeune femme vers le couteau qui illumine son visage est un signe évident, cet objet est important pour elle.
Elle est ensuite sur la réserve quant à ses capacités et l’intérêt que peut avoir un tel couteau à sa ceinture, mais ce n’est pas bien difficile de s’améliorer.

Erik ▬ Pour le coup je peux dire que le couteau est un peu ma spécialité. Donc si jamais tu veux que je te montre un peu ce qu’on peut faire avec, tu n’hésites pas, si tu veux bien sûre.

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Charlotte est plutôt une personne intuitive, bien qu'elle ne s'écoute pas toujours. Elle a horreur de blesser les gens et fait son possible pour l'éviter. Pour autant l'hypocrisie n'est pas dans sa nature. Les gens qui ne trouvent pas de place dans son coeur sont simplement mis de côtés et bien qu'elle se montrera toujours bienveillante, elle ne forcera jamais une amitié. A quelle catégorie appartenait Erik? Charlie n'en avait pas la moindre idée. Elle n'avait aucune raison de ne pas l'apprécier étant donné ce qu'il avait accepté de faire pour elle ou plutôt pour Adam, tout dépendait du point de vue, mais ça ne voulait pas dire qu'elle l'aimait pour autant. La brune se souvenait de l'impression première qu'elle avait eu lors de cette rencontre plus qu'inattendue et même si elle faisait son possible pour ne pas en tenir compte et qu'elle s'en voulait d'avoir été désagréable sans réelle raison, elle n'oublierait pas. Cependant, il était important pour elle de lui signifier sa gratitude, d'où cette conversation. Elle se disait que peut-être, le temps lui prouverait qu'Erik était quelqu'un de très bien, qui sait? Elle voulait y croire. Ce monde était assez cruel sans avoir à se méfier de ceux qui nous entourent, non? D'autant qu'Adam avait l'air de l'apprécier, alors pourquoi pas elle?

Il lui assura ne pas lui tenir rigueur de son attitude, et Charlie en fut soulagée. Effectivement, comme tout un chacun, Erik devait avoir son caractère bien à lui et là dessus, elle se l'imaginait fort bien. De son côté, Charlotte avait le sien aussi, mais peu de personne connaissent vraiment la jeune femme. Relativement discrète au quotidien, voir secrète, elle n'aimait pas que l'on sache tout à son sujet, étaler ses sentiments ou exprimer ses pensées profondes à n'importe qui. Une manière de se protéger, en somme, ce qui ne faisait pas d'elle une personne taciturne pour autant, bien au contraire. Et puis la vie était relativement paisible pour l'australienne au château, alors elle n'avait que rarement besoin de se cacher de quoique ce soit.
Lorsqu'Erik voulu en savoir davantage quant à ce qui lui était arrivé, elle hésita d'abord, puis décida de lui accorder un extrait de ses déboires, tout en restant relativement évasive. Les souvenirs étaient encore très frais dans son esprit et elle avait vraiment du mal à s'en remettre, en admettant que ce soit possible. "On s'est fait attaquées par des espèces de tarés, mais on s'est plutôt bien défendues." dit-elle en esquissant un petit sourire. Minimiser et cacher les détails qui faisaient en réalité toute la substance de l'histoire, c'était son truc, mais elle avait beau dire, les cicatrices étaient là. Il y avait celles qui la hantaient la nuit, celles qu'elle pouvait cacher, et les autres. Machinalement, elle passa sa main sur son cou. La fine trace qu'y avait laissé la lame de l'un de ses agresseurs était bien moins flagrante que celles qui ornaient son épaule gauche depuis plus longtemps, mais pas moins inquiétante. Sa hanche, bien dissimulée sous ses vêtements, n'avait pas été épargnée non plus. Autant que son esprit, son corps portait les stigmates de ses mésaventures insulaires et très franchement, elle s'en serait bien passée. Elle préférait, et de loin, les quelques petites traces que lui avaient laissé sa première fois en patins à roulette ou encore le jour où elle tenté de battre ses frères lors d'une course à vélo improvisée sur le chemin de l'école. Les traces que lui laissait Dinotopia, elles, ne représentait que des malheurs.

"Ah, c'est vrai? Pourquoi pas maintenant? Je suis vraiment curieuse de voir ça!" En plus d'être intriguée par les talents de l'outsider, Charlie était enjouée, comme elle l'était toujours lorsqu'on lui proposait de voir quelque chose de nouveau. Que pouvait on bien faire avec un couteau au point que cela devienne une spécialité? Certainement pas que des bâtons sculptés. Elle ne savait pas trop ce qu'était capable de faire Erik avec un couteau ni si cela allait l'aider ou la motiver à faire de même avec le sien, mais ce serait toujours bon à prendre, pensait elle, et surtout ça animerait un peu sa journée.

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Les hommes peu recommandables, cela ne court pas les rues à Dinotopia, mais ce n’est pas pour autant qu’il n’y en a aucun. Beaucoup pensent qu’il n’y a que les Outsiders, ces grands méchants qui mangent de la viande et restent à faire bande à part entre eux, mais c’est faux. Je me fais passer pour un citoyen modèle parfois au gré de mes voyages, même si dans certaines villes, on a bien compris que je ne suis pas vraiment de ce bord-là. Je suis en tout cas bien placé pour dire qu’il y a d’autres personnes qui sont comme moi, des visages tout sourire qui en réalité cachent la laideur intérieure de leur porteur. Il y a des personnes sur cette île qui jouent un jeu pour mieux vivre mais qui pourtant ne font que maudire les habitants et natifs d’ici. Quand Charlotte me parle des personnes qui lui ont fait ça, je me doute bien qu’elle ne parle pas de sauriens sanguinaires sur lesquels elle serait tombée. Je reconnais aisément la cicatrice caractéristique d’une lame que j’aperçois dans un de ses mouvements réflexe en parlant de sa mésaventure. Je suis une fois encore bien placé pour juger du fait que cette balafre est l’œuvre d’une arme et non d’une griffe pour avoir fait à de nombreuses reprise usage d’une lame pour mes basses besognes.  

Je sens qu’elle porte en elle une douleur vis-à-vis de cet événement qui lui est arrivé et il vaut mieux pour l’heure que je n’insiste pas plus. Etrangement, cela ne m’enchante même pas d’avoir quelque chose qui puisse jouer contre elle, d’avoir connaissance d’un semblant de souvenir traumatique avec lequel jouer. C’est sans doute encore un signe évident du fait que quelque chose s’opère en moi, un changement profond, ne serait-ce que dans ma capacité à trouver des gens sympathiques.  

Elle est assez enthousiaste à l’idée que je ne lui montre quelques petits trucs avec les couteaux. Pour des raisons assez évidentes, je pense que je ne vais pas lui livrer les raisons qui font que je suis aussi adroit avec des armes de ce genre.  

Je me tiens devant elle et en un instant, d’un mouvement de rapide du bras droit, vif et sec, un couteau se retrouve propulser du tissu ample, me permettant de m’en saisir dans l’instant. C’est un geste qui permet de surprendre quiconque vous prend pour une personne sans défense.

Erik ▬ Avec plaisir ! Si tu es prête.

Je fais un petit mouvement de la main afin de faire tourner mon couteau dans la paume, puis entre mes doigts, non pas pour me vanter, mais pour lui montrer les mouvements qu’un couteau de taille modeste permet.

Erik ▬ Première leçon, quoi qu’on en pense, un couteau suffit à toute situation. Tant que ton ennemi n’a pas d’arme à feu, tu peux gérer n’importe quoi. Sur Dinotopia, autant dire qu’avec un bon couteau, tu resteras en vie longtemps.  

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Visiblement, Charlie avait souffert durant ce voyage et s'il lui était plus facile de cacher ses blessures psychiques que physique, on les devinait aisément malgré tout. Un instant d'oisiveté et, comme ça avait été le cas à son arrivée, elle se mettait à broyer du noir, à ressasser des souvenirs néfastes, à revivre l'enfer. Le pire, c'était à la nuit tombée. Pour elle qui n'avait jamais eu peur de marcher seule au clair de lune, c'était dur de l'admettre mais désormais, elle était terrifiée. Voilà un bout de temps qu'elle ne dormait que d'un oeil. Un bête craquement de plancher ou une brindille qui cogne à la fenêtre et elle se réveillait en sursaut, tremblante et en panique. Pour autant, elle s'accrochait, espérant que le temps face son oeuvre, comme il le faisait toujours, tant bien que mal.

Aussi, une fois son travail quotidien terminé, Charlie cherchait à s'occuper l'esprit jusqu'au moment d'aller se coucher. Tout était prétexte à la distraire, alors quand Erik lui proposa une démonstration elle sauta aussitôt sur l'occasion, sans trop y réfléchir. D'autant qu'elle apprécia le fait qu'il se contente d'une réponse aussi vague que la sienne. Sans doute, pensa la brune, qu'Erik avait compris qu'elle ne voudrait pas en parler davantage.
Quoi qu'il en soit, son coeur était plus léger depuis qu'elle lui avait présenté excuses et remerciements, que les choses s'étaient apaisées, alors pourquoi ne pas profiter d'un instant de répits?

Son sourire ne disparu qu'un bref instant lorsqu'elle vit la façon dont Erik avait sorti son couteau de sa manche. L'éclat de la lame l'inquiéta d'abord, mais elle savait se contrôler. Elle ouvrit grand les yeux, impressionnée, et un peu intimidée, forcément. Peut-être qu'en d'autres circonstances, hors du château où elle se sentait en sécurité, Charlotte aurait réagi différemment. Peut-être que sa méfiance envers lui aurait pris le dessus sur ses bonnes intentions. Peut-être même qu'elle ne serait jamais allée le trouver pour lui parler comme elle l'avait fait, à l'abri des regards... mais Charlie était résolue à laisser tout ça derrière elle. Ici, elle se sentait en sécurité, chez elle, et elle comptait bien profiter de l'instant présent tout en laissant sa chance à Erik qui, très sincèrement, l'avait bien mérité.

Avec un certain émerveillement, l'australienne observa le couteau aller et venir entre les doigts agiles d'Erik. Elle pouvait d'ores et déjà affirmer que jamais, au grand jamais, elle ne serait capable d'une telle adresse, même avec un entraînement d'une vie! De nouveau, elle acquiesça. Elle n'avait encore jamais vu personne en possession de fusils ou de ce genre de choses, mais elle était plus ou moins convaincue que cela existait malgré tout. Les hommes et les armes... une longue histoire qui, même ici, n'était surement pas terminée. "Et c'est pratique, en plus. C'est léger et ça se cache facilement..." dit-elle tout en réfléchissant. Cela lui aurait surement été utile dans son voyage... "Mais comment tu peux te défendre face à un archer?" demanda Charlie qui ne cherchait aucunement à contredire son professeur du jour.

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Je ne pensais pas en me levant ce matin que je serais amené à donner un cours à une apprentie combattante et encore moins que cela pourrait être Charlotte, mais il faut croire que Dinotopia peut encore me surprendre.

Cette jeune fille est très assidue et je sens bien qu’elle m’écoute et réfléchit à ce que je lui dis de prime abord. Il faut dire que je ne m’étale pas en explication et que je vais à l’essentiel malgré une petite entrée en matière avec l’agilité de mes doigts et la dextérité à maîtriser un couteau. Elle en vient toute seule à énoncer des avantages non négligeables à utiliser des couteaux.

Erik ▬ En effet.

Elle a évidemment raison à ce sujet, un couteau est un outil particulièrement léger et discret, donc facile à transporter et ce, en toute discrétion.

Elle me questionne alors sur comment gérer un archer et il faut dire que je me suis avancé en disant que toute situation était facile à gérer avec un couteau.

Erik ▬ Face à un archer ? Ahahah ! C’est très simple voyons !

Je prends un air extrêmement sérieux, le visage fermé et sévère, juste avant de lui délivrer une fausse perle de sagesse.

Erik ▬ Tu cours.

Après ça, j’éclate de rire pour détendre l’atmosphère immédiatement et lui montrer que j’ai un peu d’humour.

Erik ▬ Evidemment, comme je le disais, dès qu’un ennemi à plus de portée que toi, c’est compliqué et il vaut mieux que tu t’en aille. Mais ce n’est pas pour autant perdu. Si un ennemi possède un arc, tu as toujours une solution, c’est comme pour une arme à feu. Ce qui compte c’est la distance. Si tu es en terrain dégagé, fuis, simplement, et conduit ton adversaire sur un terrain que tu maîtrise, ressert l’espace autour de lui. Va en intérieur, ou pourquoi pas, dans des bois. Une fois que son avantage ne compte plus, tu redeviens maître.

En réalité, dans une certaine mesure, dans les neufs mètres c’est facile de rester maître d’une situation avec des couteaux de lancer. Un archer voudra toujours profiter de la distance, mais s’il n’a plus de ligne de mire avec sa cible, il n’est pas tant avantagé que ça.

Erik ▬Si tu te caches derrière un arbre et le prive de toute possibilité de te toucher à grande distance, soit il va rester à camper sa position, soit il va s’approcher. Dans les deux cas tu y gagne, car s’il reste à t’attendre, tu peux te reposer et lui doit rester vigilant, donc tu fatigues ton ennemi. Et s’il s’approche de toi, et bien il joue ton jeu.

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Très enthousiaste, Charlie écoutait Erik avec attention, prête à retenir chacun de ses mots. Quitte à avoir un couteau, autant savoir s'en servir pas vrai? Elle avait hâte de pouvoir montrer à Adam ce qu'elle avait apprit. Ce serait une belle surprise, pensa la bouclée qui réajusta son chapeau et souriait de toutes ses dents.

"Simple?" Sincèrement étonnée, l'expression sur le visage d'Erik déteint sur le sien presque instantanément... jusqu'à la chute d'une blague pas très fine, certes, mais qui eut le don de la faire rire de bon coeur. Elle ne s'était pas attendue à ça de sa part, et c'était une belle surprise. Une fois de plus, elle s'en voulu de l'avoir si mal jugé. Peut-être que son instinct n'était vraiment pas si fiable qu'elle le croyait, finalement.
Le rire passé, elle retrouva son sérieux, tout comme Erik d'ailleurs. Elle hochait la tête régulièrement, tâchant de retenir un maximum d'informations. Charlie n'avait pas été très bonne à l'école. Apprendre des choses bêtement parce qu'on disait que c'était important alors qu'elle n'en voyait pas l'intérêt, ça n'était pas possible pour elle, mais lorsque le sujet l'intéressait, c'était une autre histoire et la cancre se transformait en élève modèle.

"D'accord!" Et intéressée, elle l'était grandement. Charlie buvait littéralement ses paroles. "Comme c'est malin..." admira la jeune femme. Elle n'était franchement pas certaine que ces conseils stratégiques lui soient utiles un jour, mais elle les retiendrait tout de même. Ils l'auraient été plus d'une fois avant qu'elle ne décide de s'assagir un peu, quoi que dans le fond, en dépit de ses bonnes résolutions, les gens ne changent jamais vraiment. "Et s'il campe, on peut essayer de le rejoindre discrètement tout en restant caché pour le prendre par surprise, ou en profiter pour s'éclipser?"

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Where there are sheeps, wolves will always thrive

Je ne pensais pas que cela me ferait réellement plaisir de rire, mais c’est un fait, je viens de rire de bon cœur avec la demoiselle comme une personne tout à fait normale, à croire que cette île est véritablement en train de me changer petit à petit.

En tout cas je ne boude pas mon plaisir car pour une fois j’ai avec moi quelqu’un qui m’écoute sérieusement et boit mes paroles quand je lui apprends quelque chose. La plupart des jeunes du camp ne jurent que par les épées, longues ou courtes ou l’arc. Je ne dis pour ce dernier c’est vraiment pratique, mais à moins d’être aussi doué qu’Adam peut l’être en lieu et place de son statut de meilleur combat de la communauté, je trouve le couteau bien plus intelligent. Rien de ce qui meurent sous l’effet d’une épée ne peut pas être tuer avec un couteau. Donc à moins de se dire qu’on peut sérieusement tuer un tyrannosaure à l’épée, franchement que ce soit des raptors ou autre c’est tout aussi facile avec un couteau. D’autant plus si on se rend habile au lancer de ces derniers.

La jeune femme aux cheveux bouclés commente brièvement mes conseils tout en ayant dans le regard la véritable étincelle de quelqu’un de motivé.

Erik ▬ La question est bonne en effet. C’est vrai que si tu attends le soir, tu peux clairement te servir de l’obscurité pour qu’il ne te voit pas t’enfuir ou te faufiler derrière lui.

Je laisse échapper un léger sourire carnassier à l’issue de sa question en réalité, car cette petite me plaît finalement. Un bref instant je repense à la façon dont moi-même j’ai abordé nombre de mes victimes par derrière. Comme une ombre dans la nuit, à pas de loup, sans un bruit avant de me saisir de ces dernières sans qu’elle n’ait un instant avant pu entrevoir qu’une telle chose pouvait arriver.

Erik ▬ T’es plutôt fluette, donc cette idée est très bonne.

Tu le vois bien, même si je suis un peu musclé car il faut bien sur cette île, je ne suis pas une armoire à glace comme certain golgote du château avec beaucoup de testostérone pas peu de neurones. Il faut pouvoir transformer un désavantage en force. Si tu es petite, tu es plus discrète. Avec les cheveux foncés ? Parfait pour l’obscurité !

Tu veux que je te montre quelques mouvements au corps à corps pour te défendre avec un couteau ?

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Attentive et investie dans la conversation, Charlie tâche de se visualiser en situation. A vrai dire, ça n'a rien de bien compliqué pour elle qui a clairement vu la mort de très près un certain nombre de fois déjà, sur ces terres infernales. Elle se revoit, proie affolée et sans défense. Seule, elle n'aurait jamais survécue. Et puis il y avait eu cette fameuse nuit... peut-être que si elle avait su se battre, les choses auraient été différentes. Elle aurait tant voulu qu'elles l'aient été.

Toujours concentrée mais visiblement ravie qu'Erik trouve son raisonnement valable, Charlotte se demandait si elle aurait effectivement la patience pour attendre que la nuit tombe avant d'agir. Quoi qu'il en soit, il faudrait qu'elle préfère la forêt si possible. Au moins, même en plein jour et si la végétation était assez dense, elle pourrait se rendre invisible en passant derrière les troncs et les buissons. Mais pour ça, il faudrait qu'elle soit discrète, pas question de trahir sa position en chatouillant les feuilles de ses planques, ni de faire craquer les branches échouées sur le sol.

Cette idée est très bonne Elle en aurait presque rougi si elle n'était pas tant absorbée par ce que racontait Erik, mais il fallait bien admettre qu'elle n'entendait pas souvent cette phrase la concernant. La plupart du temps, ses idées n'étaient pas bonnes du tout en fait, mais elle ne s'en rendait compte qu'une fois la catastrophe arrivée, parce qu'évidemment, elle fonçait toujours tête baissée, quoi qu'on lui dise... Plus jeune, elle affirmait jusqu'au bout avoir eu raison, même si sa tête était passée à deux doigts de finir au moins aussi écorchée que ses genoux, même si ce crocodile n'était finalement pas si endormi que ça et même si sa mère piquerait une crise quand elle verrait l'état de la maison. Depuis, Charlie avait bien grandi mais dans le fond, elle restait la même. Une vraie tête brulée. Seulement, elle avait eu assez d'expériences pour entrevoir certaines conséquences et avoir peur de deux ou trois choses, ce qui peut être utile quand on tient à la vie. Sans compter que cette île l'avait considérablement assagie.
Encore une fois, elle acquiesça, tout sourire. C'est vrai qu'elle était petite et que sa silhouette pouvait lui permettre de se faufiler derrière les arbres... Evidemment, elle espérait ne pas avoir à se servir de ces conseils ni d'user d'aucune de ces tactiques, mais en dépit des promesses faites à Adam, Charlotte se connaissait bien. Quand elle irait mieux, que le temps aurait fait son oeuvre et qu'elle aurait réussi à se débarrasser de ces angoisses qu'elle ne supportait plus, si une occasion se présentait de changer de décors... "Oui, je veux bien!" s'enthousiasma la brune.

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Je suis content que Charlotte accepte de poursuivre l’entrainement avec quelques mouvements de défense qui lui serviront surement. Cette fille a du potentiel j’en suis certain. Cependant il y a quelque chose qui me chiffonne un peu et que je n’ai pas creusé juste avant, mais je sens qu’elle me fait un peu plus confiance, ou que j’ai endormi sa méfiance en tout cas.

Je tente une approche alors que je la fais adopter une position similaire à la mienne, sur la défensive pour voir un peu de quoi elle est capable d’abord sans couteau dans les mains. Je m’approche d’elle rapidement comme quelqu’un qui charge pour échanger quelques coups avec elle sans vraiment y aller à pour qu’elle puisse esquiver un peu. Puis je lance ma première offensive psychologique.

Erik ▬ Permet moi de te poser une question Charlotte, mais ça me trotte dans la tête depuis tout à l’heure.

Quand j’ai parlé du couteau qui est le moyen parfait de se défendre dans une certaine limite de distance tu as rebondi sur l’idée d’un archer.

Sans arrêter mes assauts, qu’au contraire j’intensifie, je poursuis de plus belle avec mes questions.

Erik ▬ Mais les dinosaures ne tirent pas à l’arc, donc je me suis demander pourquoi autant parler de comment contrer un campeur.

Je me demande si ses blessures sont si normales que ça et pourquoi elle s’est liée d’amitié avec une écailleuse comme celle que nous avons vu avec elle à Waterfall City. De même j’en profite pour voir un peu son niveau dans les arts martiaux et je termine mon évaluation avec mon ultime et véritable question.

Erik ▬ La seule déduction que je tire, c’est que t’as déjà eu des problèmes de ce genre non ? Ou en tout cas des problèmes autres que des écailleux j’me trompe ? T’es pas obligée de répondre ne t’en fait pas.

Je profite des questions pour faire un mouvement en passant ma jambe derrière les siennes et la mettre au sol.

Erik ▬ Ah ah faut jamais se laisser distraire !

Je rigole pour la détendre, mais l’esprit des questions est encore là. Je lui tends la main pour l’aider à se relever en la tirant vers moi.

Erik ▬ Désolé d’avoir profité de ça. Ça m’intéresse vraiment de savoir, mais c’est aussi une bonne manière de te montrer une chose. La concentration peut faire la différence entre la vie et la mort.

J’aimerai surtout savoir s’il y a des personnes à ce point peu fréquentables sur l’île pour s’attaquer délibérément à une jeune femme. Cela m’étonnerait, mais ils pourraient faire des collègues peu scrupuleux pour des projets à venir.

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Charlie qui s'était plus attendue à être spectatrice que vraiment impliquée dans la suite de la démonstration fut surprise par les mouvements rapides d'Erik. De la même façon que lorsqu'un oiseau semble vous foncer dessus alors qu'évidemment, il n'en est rien, elle eut le reflexe de reculer, le sourcils hauts sur son front. Bien vite, retrouvant contenance et voyant où il venait la mener, la jeune femme tenta d'esquiver plus adroitement, ce qui était tout à fait relatif.

Une question? A la manière dont il préparait le terrain avant de la poser, elle n'avait surement pas grand chose à voir avec ce qu'ils étaient en train de faire là. Mais maîtresse d'elle même, Charlie conserva l'expression amusée qu'elle arborait depuis qu'elle s'était prise au jeu. Et sincèrement, ça n'avait rien d'évident, surtout qu'elle sentait le sujet arriver. A mesure que l'exercice s'intensifiait pour elle, Erik précisait sa pensée et Charlie appréhendait. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'Erik était quelqu'un d'intelligent et après l'exposition de son raisonnement, elle se senti en colère contre elle. Mesurer ses paroles n'était décidément pas son fort.
Son coeur battait de plus en plus vite sans qu'elle ne sache distinguer clairement quelle en était la cause. Pas question de se laisser désarçonner pour Charlie qui, très clairement, avait bien des choses à se prouver.

Pourtant, le couperet était tombé. Net, tranchant, douloureux. Un instant de relâchement pour son esprit, et son corps se retrouvait par terre sans qu'elle n'ai eu le temps de faire quoi que ce soit pour se retenir. Il l'avait pour le moins perturbée et sa volonté n'avait pas été assez forte pour maintenir l'illusion. La plaisanterie d'Erik arracha malgré tout un sourire en coin à Charlie qui serrait les dents. La douleur était encore présente. Ca allait bien mieux, certes, mais pas à ce point. Si Adam les avait vus, l'un d'eux aurait eu droit à des remontrances et l'autre aurait sans doute tâté du sol également.
Au delà du fait qu'elle ne voulait surtout pas que l'on devine sa souffrance par pudeur, une souffrance autant mentale que physique d'ailleurs, Charlotte en avait marre de ressentir tout ça. Cette souffrance et ces angoisses qui tournaient principalement autour de ce qu'elle avait fait.

Acceptant la main que lui tendait Erik, elle lâcha un "C'est rien, t'inquiète." avant que ses pieds ne retrouvent appuis sur la terre ferme. Un peu embarrassée, elle se ferma instantanément, ne répondant que par un signe de tête qui signifiait son accord. Effectivement, elle voulait bien le croire sur ce point là.
Pour gagner un peu de temps, elle épousseta ses vêtements avec une précaution qui ne lui allait pas du tout, remit de l'ordre dans ses bouclettes et récupéra son chapeau en paille qui lui aussi, avait fait un magnifique vol plané. Elle le secoua pour le remettre sur sa tête, appréciant l'ombre qui cachait ses yeux et leur brillance traître. Charlie était encore faible, à fleur de peau, et n'avait pas encore les épaules pour affronter Erik sur aucun plan. Elle soupira, passant une main derrière sa nuque qui se courbait, plongeant son regard sur ses pieds.

Adam lui même n'était pas au courant de cette histoire et encore moins Sera qui pourtant avait demandé des détails. Charlie s'était contentée de rester évasive pour ne pas ajouter plus de poids à leur inquiétude et aussi, ne pas avoir à revivre l'histoire en la racontant. Pourtant, quelque chose en elle la poussait à s'ouvrir. L'espoir que, peut-être, il serait bon de se livrer à une oreille attentive pour se libérer un peu. Elle croisa finalement les bras sur sa poitrine, et acquiesça. Erik avait vu juste.

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Il y a quelque chose qui me fascine chez cette fille, car en réalité elle me donne tort par rapport à la première fois où je l’ai vu. Quand elle est arrivée au château, j’ai cru à une nouvelle milléniale comme il y en a partout, ingénue et pas franchement dégourdie qui allait être un poids pour la communauté en plus de ne pas être très intéressante. Cependant, je commence à raviser mon jugement maintenant que j’ai pu la côtoyer un minimum et que je commence à la cerner finement. On ne peut pas dire qu’on parle vraiment, c’est sans doute la deuxième fois seulement où nous échangeons plus qu’un simple signe de la tête ou un bonjour tout à fait cordial. Toutefois, je suis assez bon psychologue, que ce fût par mon ancien métier ou parce que je suis un psychopathe notoire. Quoi qu’il en soit, elle a des blessures en elle, c’est évident, physique il est vrai, mais psychologie aussi.

Notre échange au combat est unilatéral compte tenu du peu d’expérience qu’elle peut avoir et je commence à me poser de plus en plus de questions à son sujet car pour une vie beaucoup plus simple elle aurait dû opter pour celle des dinotopiens. Visiblement elle n’a eu aucun problème à se lier d’un minimum d’amitié avec une écailleuse et en ça je me demande vraiment ce que ça fait d’aimer quelqu’un au point de vouloir demeurer au château et accepter une vie si difficile. Je ne suis pas dupe et il m’est évident qu’elle est ici parce qu’Adam y est et que ce dernier ne pourra jamais devenir un dinotopien. Rien que cette pensée suffit à m’arracher un sourire sincère.

Je vois dans sa façon de se refaire une “beauté” comme ça en se relevant, chose que je ne l’ai jamais vu faire avant au château, qu’elle gagne du temps pour ne pas répondre. J’ai un sourire mêlé à un rire étouffé se transformant en un soufflement sec du nez. J’ai été assez longtemps avocat pour savoir qu’elle ne veut simplement pas répondre et ce n’est pas bien grave. Quand on ne répond pas, c’est souvent qu’il y a une vérité gênante ou angoissante derrière. Et pour l’heure, cela suffit à satisfaire ma curiosité la concernant.

Erik ▬ Bon, en vrai je vais te montrer un truc facile à faire quand on te saute dessus comme je l’ai fait. Ça marchera aussi bien sur les raptors que les gros balourds si tu te poses la question.

Je me place face à elle et je la regarde attentivement. Elle n’est pas épaisse, mais elle l’air d’être toute en souplesse donc ça devrait le faire.

Erik ▬ Si tu sais faire une roulade arrière c’est mieux évidemment, quand tu es au sol et qu’on te saute dessus, tu places tes jambes de façon à ramener tes genoux sur ta poitrine les pieds bien plat vers le danger. Tu pousses légèrement pour caller tes pieds sur le torse de ton ennemi et tu bascules en arrière et à ce moment-là tu pousses te toutes tes forces sur tes jambes.

Je me pose sur le sol pour lui montrer le mouvement exact avant de me relever.

Erik ▬ C’est facile à réaliser et franchement ça peut te sauver la vie. T’as pas besoin d’avoir des jambes de cycles car c’est la force de ton ennemi que tu utilises. Et tu achèves ton mouvement en te tournant pour lui lancer un couteau. Plus tu es vive, plus ta contre-attaque est efficace. Aller on essaye. Remets-toi au sol comme quand je t’ai fait tomber et tu m’envoies dans le décor quand je te saute dessus.

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Sur le visage de Charlie se dessine un fin sourire. Erik n'est peut-être pas un saint, peut-être que son intuition ne la pas trompée, qui sait? après tout, c'est arrivé si rarement... mais il a assez de gentillesse pour elle, et elle décide que ça lui suffit pour l'appréçier. Aborder ce sujet lui est difficile et manifestement, il l'a comprit. Il sait qu'il a raison, qu'elle est plus amochée qu'elle n'en a l'air, et semble s'en contenter.
Quant à Charlotte, à vrai dire, elle se sans un peu soulagée. Ca n'est pas à cause de cette question qu'elle a vu se construire de façon si angoissante, pas seulement. Quelque chose en elle s'est produit, sans doute ce que les gens appellent communément un déclic.

Revenant à ses moutons, Erik n'insista pas davantage et enchaîna avec la démonstration d'un de ses trucs à lui. Face à lui, Charlie se sentait stressée de la façon dont il l'observait. Que lui réservait il encore? Elle espérait seulement qu'il ne la ferait pas retomber, sans quoi la jeune femme n'était pas certaine de pouvoir maintenir l'illusion devant Adam. Il lui avait promis de reposer pas plus tard que la veille, comme à peu près à chaque fois qu'elle le croisait d'ailleurs.

La concentration faisait froncer les sourcils de Charlie. Ce mot était maître depuis le début des explications, bien que  l'esprit de l'australienne tente d'échapper à ses ordres depuis que le sujet de l'attaque à été abordé. Depuis qu'il se doute de quelque chose.
Pour autant, elle ne se démonte pas. Une roulade arrière, ça ne pouvait pas lui faire de mal, pas vrai? Elle avait envie d'essayer. C'était Charlie tout craché ça. Si ses frères avaient été présents, ils auraient passé la journée à renouveler l'exercice jusqu'à ce que chacun des membres de la fratrie parviennent à un enchainement parfait, quitte à avoir le torse et le dos constellé de bleus.

"D'accord. Allons y." dit-elle d'un ton déterminé, les poings serrés. Charlotte se mit donc au sol. Un instant, elle regarda le ciel. Quelques nuages gris s'étaient formés aux dessus d'eux et le soleil ne cognait plus depuis un petit moment sans qu'elle ne s'en soit rendu compte avant. *Vulnérable.*
Erik fonça sur elle, comme il l'avait averti. Elle prit une grande inspiration, niant la douleur lorsqu'elle colla ses genoux contre elle. Niant l'angoisse que lui procurait cette scène. Son coeur battait si fort qu'elle cru ne jamais avoir la force de repousser Erik. Pourtant elle y parvint. Il ne fit pas un vol plané, comme ses frères auraient aimé le voir de là où ils sont désormais, mais il ne parvint même pas à effleurer l'une de ses boucles. *Ils me manquent tellement...*Elle profita de l'impulsion prise sur le torse d'Erik pour basculer en arrière. Un instant plus tard, elle se retrouvait un mètre derrière le chapeau qui avait abandonné sa tête en cours de route, un genou sur le sol. Elle vacilla, mordant ses lèvres pour ne pas échapper de cri de douleur et tenant sa hanche comme si elle venait tout juste de recevoir le coup qui l'avait blessée. "C'est tellement simple..." *Si simple...* Ca aurait pu l'être, ce soir là aussi.

Sans crier gare, la fierté qu'elle aurait du ressentir en parvenant à réaliser ce coup là s'effaça totalement, laissant place aux sentiments qu'elle n'avait plus la force de cacher. Charlie s'effondra dans tous les sens du terme. Cachant son visage dans ses mains recouvertes de terre, la jeune femme ne pouvait contenir les sanglots qui attirèrent les regards de quelques passants.

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La jeune demoiselle est pensive depuis que j’ai abordé avec elle un sujet délicat dans le but délibéré de la perturber un peu. Le stress, il faut savoir faire avec à Dinotopia et j’ai bien compris que c’est une fille débrouillarde, mais surtout à l’esprit bravache et qui ne manquera pas dans l’avenir de refaire des frayeurs à Adam. Je suis tout aussi persuadé que si le meilleur guerrier de la communauté me voyait avec belle Juliette, Roméo aurait des choses à redire et ses poings rencontreraient mes dents. Toutefois, je n’ai pas peur d’Adam. Il pourrait m’en coller une bonne, mais il n’ira pas plus loin et au final après une bonne conversation avec lui, peut-être que le jeune homme reconnaîtrait qu’il est plus que bien venu d’entraîner Charlotte à se défendre.

Quand je fonce sur elle, je ne vis pas le vol plané que je m’attendais à faire, mais elle me fait passer par-dessus elle sans trop de mal, si bien que je me retrouve au sol quand même. C’est un joli coup pour une première moi, mais je vois qu’elle a un genou à terre car je tourne mon regard à nouveau dans sa direction. Elle a la tête baissée, mais comme je suis à terre je peux la voir se mordre tout de même les lèvres et essayer de ne pas montrer une crispation de douleur. Ce sont sans doute ses blessures. J'espère qu’elle ne se sont pas rouvertes sinon je suis vraiment mal finalement.

La jeune femme laisse échapper un sentiment de fierté en quelques mots qui me donnent illusoirement à penser qu’elle va bien, mais l’instant qui suit c’est psychologiquement qu’elle s’effondre. Elle se mette à sangloter et je ne sais pas si c’est à cause de la douleur ou d’autre chose, mais les regards se tournent vers nous. D’un mouvement énergique, je balance mes jambes vers le haut et fait onduler le reste de mon corps pour me remettre debout en un éclair. Je me tourne à nouveau vers Charlotte et je me penche sur elle avant de tourner mon regard vers ceux qui dévisagent la situation.

Erik ▬ Vous n’avez rien à faire vous ?! Dis-je avec beaucoup de froideur et de méchanceté dans la voix.

Il ne faut pas longtemps pour quel les quelques témoins ne s’en retourne à leur entrainement ou à leurs tâches pour le château.

Je pose ma main sur le haut du dos de Charlotte et porte mon visage au même niveau que le sien. Je ne perds pas mon temps à lui demander si ça va vu l’état dans lequel est est et je l’aide à se relever.

Erik ▬ Viens, on va boire un peu.

Je l’emmène un peu à l’écart, histoire qu’on arrête un peu d’essayer de la regarder après ce qu’il s’est passer et pouvoir aussi lui parler en privé.

Je ne me sens pas particulièrement coupable ou prévenant envers elle pour le coup. Je n’ai pas grand-chose à faire de ce qu’elle ressent en ce moment, mais je suis curieux de savoir la raison pour laquelle elle se trouve dans cet état. Mais je verrai bien si elle daigne m’en dire plus. J’affiche un sourire prévenant tout de même et sort une flasque en métal que j’ai trouvé sur un marché de pilleur d’épave. Elle est remplie d’une niole artisanale, un véritable tord-boyaux digne d’alcool fait maison par un gars du coin.

Erik ▬ Tiens, franchement, ça aide. Lui dis-je en tendant la flasque.

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Charlie se serait surement réjouit d'entendre Erik repousser les regards curieux de la sorte si elle n'était pas trop occupée à pleurer à chaudes larmes. Elle détestait se sentir ainsi et encore plus craquer devant témoin alors qu'elle luttait de toutes ses forces pour garder la tête haute, qu'elle faisait tout pour chasser ses démons. Rien à faire, elle était trop faible et ils revenaient au galop à la moindre petite brèche.

Elle ne vit pas le regard qu'il posait sur elle, mais elle senti sa main dans son dos et alors, elle se senti plus vulnérable encore, plus pathétique aussi. Mais quelque part, pleurer, extérioriser lui faisait du bien. Aidée par Erik, Charlie se redressa tant bien que mal, conservant autant que possible ses mains devant ses yeux qu'elle n'avait de cesse d'essuyer et d'essuyer encore, quitte à en avoir mal, pour en effacer les larmes. Larmes qui semblaient ne jamais pouvoir se tarir. Ses sanglots couvrirent les paroles d'Erik, mais elle se laissa guider, petite chose fragile qu'elle était. Successivement, la colère, la honte et la souffrance alimentaient les pleurs de Charlie.

A l'écart des regards indiscrets et des murmures curieux ou inquiets, la jeune femme se força à respirer sur un certain rythme pour retrouver son calme. Ce qui l'aida grandement, c'est d'avoir pour objectif de boire dans cette gourde sans s'étouffer dans un de ces restes de sanglot qui vous prend par surprise alors que vous croyez que c'est terminé. Elle ne releva la tête que dans l'idée de prendre une grande rasade d'eau, mais se stoppa net une fois que le liquide eut atteint ses lèvres. C'était affreusement fort. Puis, sans réfléchir, et parce qu'elle aurait payé cher pour pouvoir être ivre en ce moment même, Charlotte en descendit plusieurs longues gorgées, sans pour autant aller jusqu'à la vider. Sa gorge brûlante, elle se senti un peu mieux, en effet.

Essuyant sa bouche de son avant bras, Charlotte rendit la gourde à Erik. Elle s'assit sur un vieux tonneau qui cachait une myriades de toiles d'araignées dans l'angle des murs de pierre où ils se trouvaient. "Merci, et pardon pour ça..." fit-elle en réprimant violemment une nouvelle envie de craquer. "C'est tellement pitoyable..."

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La jeune femme est en pleine crise mais je me demande ce qui peut induire ça. Clairement ce n’est pas seulement la douleur. Ou alors elle serait plus douillette qu’elle ne le laisse à penser. Elle a de sérieuses blessures qui mettent du temps à guérir. Je ne sais pas ce qui lui est arrivé, mais peut être que c’était du tout comme être attaquer par un carnivore et avoir frôler la mort. En tout cas, elle reste digne à chaque fois que je l’aperçois dans le château malgré sa situation donc il m’est très difficile de croire que c’est seulement la douleur.

Il y a quelque chose de plus gros derrière tout ça. Le genre de levier dont j’adore avoir connaissance pour pouvoir jouer avec une personne. Mais là, étrangement il y a autre chose. Je me sens étrangement concerner par ce qui lui arrive comme si j’avais quelque chose à faire d’avoir indirectement aider à produire cet état chez elle. Hum. C’est peut-être parce que je me dis que c’est mieux que Charlotte aille bien pour qu’Adam soit dans un bon état d’esprit et donc tout ça est bon pour la communauté et donc pour moi. Oui c’est sûrement pour ça.

Je souris lorsque Charlotte s’arrête un instant en comprenant que dans la flasque en métal ce n’est pas de l’eau que je lui offre. Toutefois, je suis encore plus surpris lorsqu’elle décide d’un coup de laisser couler cette niole dans sa bouche en de grandes gorgées. Clairement elle en avait bien besoin quand même.

Je sens bien quand elle me tend la flasque en s’excusant que ce n’est pas fini. Elle en a gros sur la conscience cette fille et je ne sais pas trop ce que je préfère entre aider ou juste la laisser tranquille et m’épargner ça. Finalement, je me décide.

Erik ▬ Oh ne t’inquiète pas. Mais si tu veux, tu peux me parler.

Je ne sais même pas pourquoi j’ai choisi cette option. Est-ce qu’elle me ferait de la... peine ?

Erik ▬ Tu ne le sais surement pas, mais dans le monde extérieur j’étais avocat. Le secret, ça me connait. Si tu as besoin de parler pour te soulager un peu, j’emporterai ça dans la tombe.

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Une pauvre fille, voilà ce qu'elle avait le sentiment d'être en cet instant. Elle était sur le point de partir au moment où il reprit la parole. D'ailleurs, elle s'était redressée, prête à s'enfuir pour retrouver le calme de ses champs. Mais la proposition d'Erik stoppa net Charlie qui se trouvait maintenant partagée entre l'envie de disparaître, et cette occasion qu'elle avait de se libérer. Elle resta un instant là à le fixer de ses yeux toujours larmoyants, indécise, perdue.
Se confier? Ca n'était certainement pas dans ses habitudes et la seule fois où elle s'était imaginé parler de tout ça, c'était à Adam et personne d'autre. Ce qu'elle n'avait pas encore fait dans le détail, d'ailleurs, de peur de sa réaction. Et s'il partait en quête de ces fous furieux?

Lorsqu'il lui avoua avoir été avocat dans cette autre vie qu'elle-même avait perdu, la jeune femme se laissa lourdement retomber sur le tonneau qui ne broncha pas sous son poids. Ses mains en appui sur ses genoux, les bras tendus, Charlotte abdiqua. C'était peut-être idiot, mais ce métier qu'il avait exercé, son appartenance à ce monde perdu pour toujours et surtout, sa promesse, étaient des arguments rassurants pour elle qui avait plus que jamais besoin de l'être. Les yeux clos, elle rassembla son courage.

"On a été prises en chasse. Des espèces de tarés qui nous lançaient des flèches depuis les bois. On pensait les avoir semé, mais c'était un piège. On était encerclées." Au ton emprunté par Charlie, on devinait qu'elle revivait la scène avec exactitude. Et en effet, elle n'avait oublié aucun détail. "Un des types m'a fait tomber de son dos avec un lasso _c'était le chef je crois_ et m'a mit son couteau sous la gorge. Si Xyria ne se laissait pas faire..." Elle dégluti, se rappelant du souffle dans son cou, de l'odeur de son propre sang, chaud, coulant lentement sur sa poitrine. "C'était des sadiques, ils riaient, ils riaient..." Et leurs rires, elle les entendait encore à la nuit tombée. "Par miracle, j'ai réussi à reprendre le dessus..." En disant cela, ses doigts parcoururent machinalement la fine cicatrice qu'elle conservait de cette contre attaque, sur sa gorge. "Il a essayé de me convaincre de les rejoindre, et quand il a comprit que c'était peine perdue, il m'a menacée comme tu t'en doutes. Finalement on a réussi à fuir. On s'est réfugiées dans un village..."

"Et il est revenu." L'histoire était bien loin d'être terminée à ce stade. Jusque là Charlie avait eu peur, c'est vrai. Elle avait été blessée aussi, mais elle s'en serait remise. "Il est venu me chercher dans la nuit, quand tout le monde dormait. Il était enragé." Cet homme là n'avait rien d'humain. Un vrai barbare, voilà ce que c'était. "Il me tenait par les cheveux. Je les sentais se casser à chaque pas qu'il me faisait faire et qui m'éloignait un peu plus du village, d'une chance d'être secourue... mais personne ne s'est réveillé, personne n'est venu. Il était au dessus de moi et je priais." elle eut un rire bref et mauvais envers elle-même. C'est notamment l'exercice qu'Erik lui avait faire qui lui avait rappelé cet épisode là. Mais en fin de compte tout, absolument tout dans son quotidien était susceptible de faire ressurgir ces souvenirs cauchemardesques. En fait, elle y repensait constamment, nuit et jour. "Sa lame était pointée sur mon coeur et il me maudissait, me promettait l'enfer, et pire encore. J'ai cru que c'était la fin. Sincèrement, jusqu'au dernier moment. Et je crois... je crois que je suis devenue folle. Folle de rage." Les larmes coulaient de nouveau et son expression était aussi sombre que sa voix. "Il avait trop de force pour moi, alors... j'ai réussi à me décaler et j'ai laissé son couteau atteindre mes côtes... et j'en ai profité pour..." Elle souffla un coup, essuyant ses yeux devenus rouges. "J'ai enfoncé mes doigts dans ses yeux jusqu'à sentir ses orbites sous mes pouces... Il hurlait, il hurlait, alors j'ai reprit le couteau et je l'ai poignardé. J'ai arrêté de compter quand..." Et elle reparti en sanglots après avoir lâché cette ultime phrase. "Je suis un monstre."

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J’étais prêt à la voir simplement partir après mon invitation à rester en lui livrant une partie de mon passé pouvant être le réceptacle de sa douleur un bref instant. Mais elle est restée et s’est assise à nouveau sur le tonneau qui lui sert de siège. A ce moment-là, c’est une petite victoire personnelle car si elle reste c’est qu’elle place une forme de confiance en moi et j’ai donc réussi à rattraper le coup de notre première rencontre où elle a senti la bête meurtrière qui est en moi et ne demande qu’à sortir à nouveau. Je sais que beaucoup de tueurs dans le monde ont toujours avancé qu’ils ont des principes. Pour avoir représenté quelques tueurs à gage qui se sont fait attraper, il y a toujours cette façon de dire “jamais les femmes ou les enfants” comme si c’était une excuse valable pour ne pas être un monstre. C’est faux. Pour ma part, je n’ai jamais tué d’enfant, mais quand j’en était un ce n’est pas passé loin. A la place c’était des animaux. En grandissant, mon tableau de chasse s’est garni d’hommes, mais surtout de femmes. C’est ça être un prédateur, bien qu’un véritable prédateur tue pour sa survie, ici on devrait parler de chasse sportive.

Quand elle commence à me raconter son histoire, je reste calme, comme lorsqu’un client le faisait également. Comme à l’époque, j’étouffe la moindre réaction pour rester de marbre et ne pas montrer mon intérêt malsain pour la chose. Son histoire est entrecoupée par la reprise de respiration, les trémolos dans la voix dû à l’émotion grandissante, mais c’est comme un récital d’opéra qui me fait voyager. Je peux parfaitement me représenter les événements qu’elle me dépeint. Elle revit toute la scène et son corps se crispe de partout à mesure qu’elle avance dans son récit ce qui en dit plus encore sur l’horreur qu’elle a vécu.

Une chose m’étonne en revanche en l’écoutant c’est que ma passion n’est pas tournée comme avant sur le plaisir d’entendre les sévices exercés à l’encontre de la victime. Non, ici c’est différent. Plus elle me parle de sa nuit de l’effroi, plus je pense à ce groupe d’hommes que je n’ai jamais vu et dont je n’entends pas parler. C’est étonnant car je m’arrange toujours pour en savoir le plus possible sur tout et toute chose de l’île qui pourrait m’apporter un avantage dans ma vie ici. Non, ici il y a quelque chose d’autre. Je suis excité, c’est vrai, mais par le vécu tragique de Charlotte, mais bien par la perspective de pouvoir faire disparaître ces hommes sans que personnes n’en sache jamais rien. Des barbares sanguinaires qui vivent encore plus en marge de la société que les outsiders et n’ont pas le respect de la vie humaine. Que voilà une bien étrange existence à Dinotopia. Evidemment, leurs exactions doivent être mises sur notre compte et c’est pour cela que j’entends de telles rumeurs sur nous. Tout s’explique.

La conclusion tombe pour Charlotte et c’est terrible. Me ferait-elle véritablement de la peine ? Impossible ! Cela ne se peut ! Je suis un psychopathe diagnostiqué, un monstre terrible dénué de système empathique. Je ne peux pas être peiné par sa situation et pourtant j’ai envie de lui venir en aide pour qu’elle se sente mieux.

Erik ▬ Un jugement sévère votre honneur.

Tu n’es pas un monstre Charlotte. Et franchement je m’y connais en monstres. Toi, tu es une survivante, voilà ce que tu es. Tu t’es retrouvé face à un monstre qui voulait ta peau et face à la mort tu lui as dit d’aller se faire foutre. Voilà ce que t’as fait. Voilà ce que tu es.

Je laisse un moment de silence s’installer pour qu’elle puisse se calmer un peu plus et puis je fouille dans ma besace pour sortir un petit bocal avec des feuilles séchées dedans. Je sors également une grosse feuille sèche, mais assez souple encore, et je commence à rouler un semblant de cigarette, bien que ce soit plus un cigarillo. Je l’allume et tire une latte, toujours silencieux avant d’en proposer à Charlotte. La dopamine et les endorphines, c’est ce dont elle a besoin en ce moment, mais chacun son truc. Je pense à ces hommes et j’ai envie de crever l’abcès.

Erik ▬ Ces hommes. Tu sais où ils se cachent ? Peut-être que Xyria sait sinon ? Je pourrais me renseigner discrètement si tu veux.

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Where there are sheeps, wolves will always thrive

Charlotte s'était plus ou moins attendue à ce qu'Erik essaie de la réconforter. Toute personne normalement constituée l'aurait fait, souvent avec beaucoup de maladresse, histoire de dissiper le malaise au plus vite, ou juste par principe. Ca n'est pas ce qu'elle cherchait en se confiant à lui. Il s'agissait d'une tentative, surement vaine, de libérer un peu ce coeur qui avait déjà bien souffert, voilà tout. Elle comptait sur l'ancien avocat qu'il était pour garder son secret, quitte à simplement hocher la tête, lui tendre à nouveau sa gourde pleine de cet alcool infame, sans dire un mot. Des mots creux, elle n'en voulait pas.
Pourtant, comme un papillon de nuit attiré par une vive lumière, elle avait relevé la tête pour voir les yeux d'Erik qu'elle avait pourtant fuit avec beaucoup de précaution jusqu'alors. La jeune femme se surprit à croire à ce qu'il racontait. Pas seulement quand il affirmait qu'elle n'était pas un monstre, mais aussi lorsqu'il disait s'y connaitre, en monstre justement.

Le regard des villageois sur elle, après ce soir là... c'était bien celui de la peur, non? Certains l'avaient dévisagée, d'autres avaient fuis son regard, évité de croiser son chemin... elle n'avait pas rêvé. Ca n'était pas ainsi que l'on regarde une survivante, n'est-ce pas? Peut-être que les dinotopiens n'étaient pas exactement les mieux placer pour la comprendre, après tout... Quoi qu'il en soit, les paroles d'Erik eurent au moins le mérite de calmer ses pleurs qu'elle avait tâché d'étouffer entre ses mains, repassant en boucle dans son esprit comme une berceuse réconfortante. Peut-être qu'à force de se le répéter, elle finirait par s'en persuader?

Toujours perchée sur son tonneau, elle l'observa dans un silence seulement perturbé par ses reniflements sporadiques et le bruissement des feuilles qu'il roulait entre ses doigts. Vidée de ses forces comme à chaque fois qu'elle perdait le contrôle de ses émotions, Charlie suivait attentivement le mouvement de ses pouces sur le végétal. Elle tendit automatiquement la main lorsqu'il lui tendit ce qui ressemblait à une grosse cigarette, et comme elle l'avait fait des centaines de fois lors des soirées les plus arrosées de son existence, la porta à ses lèvres pour la fumer, sans méfiance. La brune toussota, puis refit une tentative. Là encore, le goût était écœurant au possible, mais elle en reprit plusieurs lattes avant de la rendre à Erik dans un léger soupire. Elle avait oublié ces sensations. Comme c'était si fondamentalement mauvais et si bon à la fois.

"Pourquoi faire?" répondit elle du tac au tac alors qu'elle séchait tout juste ses dernières larmes. Qu'avait Erik en tête, elle n'était pas sûre, mais elle voyait la chose arriver et ça ne lui plaisait pas du tout. A peine s'était elle confiée qu'elle commençait déjà à le regretter. Se sentir un peu mieux, et à quel prix?

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Where there are sheeps, wolves will always thrive

L’ambiance se détend un peu, malgré ce qui a été dit avant et revécu par introspection pour ce qui est de Charlotte. Lorsque je lui tends ce semblant de cigarette, c’est un peu par automatisme qu’elle la saisit j’ai l’impression, mais le résultat est détonnant avec ses quelques toussotements. A ce moment-là j’éclate de rire sans feindre le moins du monde car c’est comme revoir une scène d’un grand frère faisant fumer pour la première fois sa petite sœur. Ce qui est à des années lumières du genre de banalité de l’île.

Erik ▬ C’est franchement dégueulasse, mais j’ai du mal à ne pas fumer de temps en temps pour me raccrocher à quelques choses que je connaissais d’avant.

Je n’ai jamais été un grand fumeur. J’ai toujours trouvé ça dégoutant et digne des gens de mauvaise extraction social pour tout dire. Toutefois, il m’arrivait de célébrer une victoire éclatante au tribunal avec une cigarette ou un cigare en plus d’un très bon alcool de luxe.

La réponse sèche et du tac au tac à ma question me surprend totalement. C’est à croire qu’elle n’est plus affectée par le bond émotionnel de l’instant précédant. C’est à n’y rien comprendre, mais je ne me laisse pas démonter et je n’affiche à aucun instant ma stupeur sur mon visage.

Je ne fais pas grand casa de ce qui est arrivé à Charlotte. Tout au plus, si je connaissais la position de ces individus plutôt barbares, peut-être que cela me servirait dans l’éventualité d’un très grand besoin d’amusement. Mais c’est bien plus pragmatique comme question. Je ne veux simplement pas avoir d’ennuis sur la route. Ce serait bien trop contraignant par rapport aux affaires que je mène en plus de mes chasses pour apporter ma part à la communauté. Je navigue régulièrement de villes en villes dans le but d’échanger des produits ou des objets aux dinotopiens sous le couvert d’être un marchand itinérant, me cachant bien de dire à qui que ce soit que je suis un outsider.

Erik ▬ Franchement ? Pour éviter d’avoir des problèmes. Ces gars ont l’air d’être de vrai tarés et tu ne l’as peut-être pas remarqué, mais je bouge souvent d’ici pour parfois de longs trajets. Pourtant en quatre ans je n’ai jamais croisé de gars comme ça.

Faire une mauvaise rencontre a plusieurs inconvénients à commencer par le risque d’y laisser la vie. Bien qu’ils ne s’attendraient surement pas à ce que je suis capable de faire et avec une carrure qui n’est pas très impressionnante ils se montreraient aussi confiant qu’avec Charlotte jusqu’à le payer très cher. Mais remettre des malfrats à leur juste place fait perdre du temps, tout comme devoir fuir discrètement une situation fâcheuse. Et le temps, c’est de l’argent.

Erik ▬ Je ne suis pas un redresseur de tort. Je veux juste éviter les emmerdes. T’inquiète pas. Ton secret est bien gardé je te l’ai déjà dit.

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Lorsqu'ils étaient adolescents, ses frères revenaient parfois de l'école avec un paquet de cigarettes entamé. La marque n'était jamais la même et bien qu'aucun d'eux n'ai répondu autrement que par des blagues à Charlie, elle était sûre qu'ils les piquaient aux professeurs ou à tout autre adulte un peu trop négligeant avec ses affaires ou trop confiant quant à l'honnêteté de leurs élèves. Après les cours, ils passaient au skate park et fumaient les uns après les autres tout en commentant les performances de chacun sur leur planche respective. En grandissant, seul Adrian y avait pris goût, une partie du tabac ayant peu à peu été remplacé par une substance plus enivrante.  Luke et Charlotte lui en empruntaient parfois, pour faire la fête ou pour apaiser leur colère ou leur peine en cas de coup dur, ce qui ne fonctionnait évidemment pas.

Tout comme aujourd'hui d'ailleurs. Erik se mit à rire de bon coeur lorsque la jeune femme se mit à fumer. Cela lui arracha un sourire en coin, mais elle ne parvint pas à retrouver sa bonne humeur pour autant. Elle hocha la tête. Qui mieux qu'elle était en mesure de le comprendre? Voilà plus de deux ans qu'elle se trouvait là et pourtant, elle aurait donné n'importe quoi pour pouvoir allumer le téléphone portable qu'elle avait retrouvé chez les pilleurs d'épave. Pas dans l'espoir de capter le moindre réseau, non, Charlie savait que cette île ne laisserait jamais personne la quitter. Et puis à quoi bon? Elle n'avait plus personne à retrouver là bas. Ce qui l'intéressait, c'était bien le contenu de l'appareil à la vitre brisée. Des souvenirs si précieux qu'elle serait prête à vendre son âme pour les récupérer.

Les sourcils froncés, Charlotte avait accueillit la question d'Erik avec appréhension et inquiétude. Et s'il trahissait sa promesse? Et s'il parlait de tout ça avec un autre guerrier, avec Adam? Et s'il avait tellement pitié d'elle qu'il décidait de la venger au nom du clan, ou quelque chose dans le genre? En une fraction de seconde, la brune s'était imaginé tout un tas de scénarios possible aboutissant tous à un bain de sang et dont la cause était toujours la même : elle.

"Hm... Excuse-moi..." Elle expira, agacée de sentir ses nerfs à vif. Traumatisée, le prisme sous lequel la brune voyait la vie était particulièrement sombre, ces derniers temps. "Je..." elle passa une main sur son visage, "Je suis un peu à fleur de peau et... je sais plus quoi penser, en ce moment. Enfin je réfléchis mal, désolée." Seulement un peu? "Je suis pas sûre de pouvoir te l'expliquer... Une seconde." Elle attrapa un bâton qui traînait à ses pieds et se mit à tracer un semblant de carte au sol. A force de dessiner cette fichue île, elle commençait à la connaître par coeur. Au sol, elle en fit le contour puis y ajouta dans l'ordre les repères nécessaires. Le château, le camp, la route bordée par la forêt et Waterfall city. "On a suivi une sorte de route depuis le camp Gallimimus." D'un geste qui sembla douloureux pour elle, Charlotte fit apparaître une croix, puis une seconde. "On s'est fait attaquées là je dirais... et ils nous ont poursuivi un certain temps dans cette direction. Le village devait se trouvait là." Après ça, elle se redressa et prit un moment pour regarder un peu mieux sa carte, destinée à être balayée d'un simple coup de pied une fois leur discussion terminée. "Mais j'suis sûre de rien. Tout ce que je peux dire, c'est qu'ils tendent des pièges aux voyageurs pour les pousser à entrer dans la forêt... " Après un temps relativement court qu'elle estimait suffisamment pour qu'Erik enregistre l'information, elle se dépêcha d'effacer son dessin, créant un nuage poussiéreux à leurs pieds. "De toute façon, j'imagine qu'ils se sont enfuis en ne voyant pas leur chef revenir... ou qu'ils ont été rattrapés par les gardes du village une fois qu'on a donné l'alerte... Enfin j'espère."

Parler de tout cela semblait lui faire plus de mal que de bien, en fin de compte. Les yeux dans le vide, Charlie faisait peine à voir. Son esprit n'était plus très clair, mais elle savait que demain, elle aurait beaucoup de regrets. "Merci d'avoir été si gentil avec moi... Je crois qu'il vaut mieux que je rentre... Elle s'était suffisamment étalée comme ça pour aujourd'hui et espérait sincèrement pouvoir compter sur la parole d'Erik et sur le fait que tout ça l'aiderait quand même un peu à se remettre.

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